samedi 21 août 2010

Le Web : cause ou solution à la crise des médias? (suite) - Analyse

Ayant décrit de façon assez explicite comment les médias traditionnels perçoivent les contenus produits sur et par le biais du Web 2.0 - et pourquoi ils représentent pour eux une problématique sérieuse - lors de ma dernière analyse de la table ronde Le Web : cause ou solution à la crise des médias? qui a eu lieu dans le cadre de l'École d'été de l'Institut du Nouveau Monde, je m'attarderai maintenant sur le renouvellement que l'approche des médias sociaux peut leur apporter.

L'essence même du Web 2.0 étant l'approche multilatérale de l'accès à l'information et de la publication de contenu, forme de démocratisation du journalisme qui devient alors journalisme-citoyen, il en résulte tout d'abord une augmentation phénoménale de la quantité d'informations et de réactions susceptibles d'être retransmises par les médias traditionnels. En ce sens, les chaînes d'information en continu pourraient faire appel à ces données puisque leur mission première est de remplir leur temps d'antenne et que leur problématique première celle du manque de contenu.

Cette approche mènerait à un changement significatif dans le rapport à l'information, car elle permettrait à une multitude d'individus - auteurs, commentateurs et témoins - d'entrer en relation avec le très large auditoire des médias de masse et de l'interpeler tout en lui donnant les moyens de réagir directement à cette interpellation. Ainsi, toujours dans le cadre de cet exemple spécifique, les chaînes d'information en continu pourraient héberger en temps réel un débat citoyen sur l'enjeu soulevé, ce qui aurait trois conséquences directes positives :

  • Une plus grande exactitude dans la mesure de la position de la population que dans un sondage d'opinion traditionnel : les messages relayés par les médias sont multidimensionnels de par leur forme - ils prennent en compte, explicitement ou implicitement, tous les aspects qui ont influé sur la réflexion - et non binaires - oui/non, aime/n'aime pas - car ils incluent le « pourquoi » de la position prise, ils donnent une perspective globale de la situation par leur provenance qui ne souffre pas de limites, et sont complexes puisqu'ils sont pensée et non opinion sur celle du sondeur. Ou, tout du moins, ils offrent ces possibilités.

  • L'élimination d'une partie de la distance entre le niveau décisionnel de l'État et les préoccupations de ses citoyens. Comme ces derniers interpellent à la fois les décideurs et toute la population en direct, créant une marée de messages et de questions sur un point bien précis, il devient beaucoup plus difficile pour nos dirigeants de changer de sujet tout en gardant le contrôle sur leur image ultramédiatisée. Les forcer à répondre et à rendre des comptes semble en ce sens la façon la plus sûre d'obtenir des résultats de nos politiciens.

  • Bien que la pertinence de certaines interventions soit questionnable ou que le consensus se dégageant d'une telle formule d'échanges puisse être interprété comme un sophisme (appel à la majorité), il est possible d'en dire autant des invités membres du star-système appelés à commenter un évènement d'actualité en raison de leur popularité et non de leur spécialisation dans le domaine couvert (appel à l'autorité). De plus, l'avantage clair de grands débats citoyens diffusés par les médias de masse est d'obliger les auditeurs à développer leur esprit critique : face aux multiples positions présentées, ils doivent juger à laquelle ils adhèrent en analysant les arguments présentés par chaque intervenant, ne pouvant plus simplement affirmer leur accord ou leur désaccord.

En ce sens, je crois que les médias traditionnels manquent une occasion en or de transformer leur façon d'envisager le rapport à l'information, « one-to-many » à « many-to-many », chose qui sera probablement nécessaire à leur survie.

À suivre,


FredK

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